Quoique ayant vécu sous les pontificats de
Benoît XII (1334-42),
Clément VI (1342-52), Innocent VI (1352-62),
Urbain V (1362-70) le Bienheureux, Grégoire XI
(1370-78) et Urbain VI (1378-89), tous des papes reconnus pour leur franche
gaieté et leurs tours pendables (on raconte que c'est Innocent VI, lui-même,
qui aurait inventé le poil à gratter), Charles Marshall, dit Charles le
Sage, était un homme austère, ascétique, sérieux au point de ne jamais avoir
ri une seule fois dans sa vie et dénudé complètement de ce qui aurait pu
passer pour un certain sens de l'humour à l'époque où, quand même, la peste
noire faisait rage en France, la guerre civile à Bysance et que les Ottomans
s'apprêtaient à envahir l'Europe de l'Est.
Vêtu d'une haire ou d'un silice, portant à la
ceinture une discipline et parcourant l'Europe (et même l'Asie occidentale),
on raconte qu'il alla même jusqu'à s'auto-mutiler pour ne pas attirer vers lui
des dames aux moeurs légères qui auraient pu être intéressées par sa personne,
Dieu l'ayant malheureusement fait très beau.
Quel métier il exerça, on n'en sait rien. En 1359, il
est à Paris parmi les pauvres et les plus démunis ; en 1363, il est à Rome où
il distribue des objets saints ; en 1370, il est à Constantinople, dégustateur de loukoums, une friandise qu'il
n'appréciait tout particulièrement pas.
Une sainte femme, aveugle, sourde et muette - et qui
allait mourir paralytique - aurait eu, selon la légende, pitié de lui au point
de l'épouser, vers 1367, afin de lui donner un fils. Ce fils devint Charles le Fou,
"la nature étant, comme il le disait lui-même vers la fin de sa vie, un immense balancier".
On lui connaît quelques poèmes sur la mort et la
souffrance ainsi qu'un manuel devant servir lors de grandes périodes de deuil ou
durant des obsèques.
Elizabeth Regina - Sosthène du Cresson - Herméningilde Pérec - 09-05